Hérault : Un collégien harcelé pendant six mois, la gendarmerie envisage des poursuites contre le collège pour inaction

Le 19/06/2025

Dans Harcèlement

Depuis décembre, Chamis Bernabé, 14 ans, subit des violences homophobes dans son collège à Poussan. Malgré des alertes répétées, l’établissement n’a rien fait. Aujourd’hui, la gendarmerie de Balaruc-les-Bains prend les choses en main. Une affaire qui secoue la communauté scolaire et met en lumière un silence institutionnel de plus en plus insupportable.

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Depuis six mois, le quotidien d’un collégien est marqué par la violence.

Chamis Bernabé n’est pas un élève comme les autres. Courageux, mature, engagé, il a décidé de documenter sa propre descente aux enfers. Collégien au collège Via Domitia de Poussan, il a subi pendant plus de six mois des insultes violentes, des moqueries, des mises à l’écart et des remarques ouvertement homophobes.

« On me disait que j’étais une erreur, que je faisais honte à la classe », raconte-t-il.

Ces violences ont eu lieu en pleine journée, dans les couloirs, en classe, parfois même devant des adultes. Mais aucune mesure apparente n’a été prise à ce jour. Les élèves responsables sont identifiés. Pourtant, ils continuent de venir en toute impunité.

Un document de 10 pages remis au collège, sans aucune réaction

Face à l’inaction de l’équipe pédagogique, Chamis a pris l’initiative de rédiger un dossier de 10 pages. Page après page, il y a répertorié chaque humiliation, chaque phrase violente. Il l’a remis officiellement à la direction début mi-mai.

« On pensait que ce dossier allait provoquer une réaction immédiate. Mais non. Aucun retour.  Aucun changement. »

Cela fait plus d’un mois que ce dossier est entre les mains de l’administration du collège. Toujours aucune mesure disciplinaire, aucun signalement au rectorat, et surtout aucun soutien apporté à l’élève.

 

La gendarmerie de Balaruc-les-Bains intervient

La situation aurait pu rester dans l’ombre. Mais dimanche dernier, la famille de Chamis a déposé plainte auprès de la gendarmerie de Balaruc-les-Bains. Et cette fois, la justice a décidé de réagir.

La gendarmerie, après avoir pris connaissance du dossier et des témoignages, envisage d’engager des poursuites contre le collège Via Domitia pour inaction. Une procédure rare, mais permise dans le cadre de la loi de 2019 sur le harcèlement scolaire.

Une plainte a été déposée auprès de la gendarmerie, qui a confirmé avoir ouvert une phase de recueil d’éléments.

 

Les élèves mis en cause toujours pas sanctionnés

Le plus troublant dans cette affaire, c’est que les auteurs des violences sont identifiés depuis longtemps. Chamis les a nommés. D’autres élèves ont témoigné.

« L’un d’eux l’a traité de “pédé” devant toute la classe. Et rien. Aucune sanction. On nous dit qu’on “observe la situation” ».

Aujourd’hui encore, ces élèves croisent Chamis tous les jours dans les couloirs. 

 

Le CPE convoque les parents

Afin d'approfondir la situation, le CPE décide de convoquer les parents.

Au début de l'année, la mère a été convoquée. Elle a entendu les propos dits par le CPE, plutôt rassurants.

Certes, non tenus, car aucune sanction, aucune mesure n'a été mise en place.

Après la convocation, une médiation a eu lieu entre les élèves et Chamis, qui a su apaiser les tensions pendant quelques temps.

Le harcèlement s'est alors intensifié de plus en plus. Un nouveau signalement de Chamis auprès de l'administration a conduit à une nouvelle convocation, cette fois du père de Chamis.

Le CPE a dit que Chamis risquerait d'être sanctionné, ainsi que ses harceleurs — qui ne le sont, à l'heure d'aujourd'hui, toujours pas.

On nous demande également que Chamis revoie un psychologue afin de soigner ses traumatismes !

C'est encore une fois lui, le problème.

"Non, Chamis n'y retournera pas. Il a assez vu de professionnelles pour l'aider à avancer. Maintenant, c'est STOP ! C'est la victime, pas le problème de ses bourreaux. On refuse de se taire. Chamis restera comme il est, il ne changera pas. Ce qui est alors le plus inquiétant, c'est qu'aucune mesure ne soit prise, alors qu'on arrive à grands pas de la fin d'année. On demande que les harceleurs soient punis, et qu'ils fassent un énorme travail sur eux-mêmes. On ne peut pas se permettre d'essayer de détruire quelqu'un alors qu’eux-mêmes ne sont pas construits. Chamis a assimilé le bien et le mal. Et aujourd'hui, il a bien compris que le mal venait d'eux, sans se préoccuper de la frustration des autres". Raconte le père de Chamis.

Également, un refus de changement de classe :

"On ne peut pas changer de classe les élèves, sinon on ne s'en sort plus", cite le CPE.

Le CPE dit également à Chamis qu’à chaque fois qu’on lui parle un peu violemment, il se sentirait agressé en vue des traumatismes vécus les années passées.

 

 

Chamis, entre isolement et courage

Malgré tout, Chamis continue d’aller au collège chaque jour. Il tient bon, avec l’aide de sa mère et de quelques amis fidèles. Mais le poids est lourd.

« Il est fort, mais il ne devrait pas avoir à être fort ».

Le soir, Chamis écrit. Il note chaque mot entendu. Il documente ce que personne ne veut regarder. Il transforme sa douleur en un dossier devenu pièce centrale de l’enquête.

Une affaire qui pourrait faire jurisprudence

Si la gendarmerie confirme son intention de poursuivre le collège, l’affaire Chamis pourrait marquer un tournant judiciaire. Car peu d’établissements sont aujourd’hui tenus pour responsables d’inaction face au harcèlement. Pourtant, la loi le permet.

 

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